jeudi 6 novembre 2014

Le Dr Gamin prend sa retraite mais le blog continue

Dessin de Geluck
J'ai largement dépassé la date de péremption donc j'arrête au 31 décembre 2014.
 Certains me disent : "mais je vous aurais donné 5 ans, 10 ans de moins".
"Pourquoi pas 20 tant qu'on y est ?"

Après une longue carrière dans les Hôpitaux de Paris où j'ai vu "des cas",
je me suis installé en province où j'ai vu "des enfants et leurs parents".

Là où je me suis installé il y avait de bons pédiatres, j'étais "parisien", on n'avait pas besoin de moi. Les débuts ont été difficiles. Après quelques mois, je suis allé voir le plus grand obstétricien de la ville installé à  50 mètres de chez moi. Il m'a expliqué, lui qui faisait naitre tant d'enfants que mon quartier (et le sien donc !) n'était pas porteur, il n'y avait pas d'enfants.

    Quelques années plus tard vers 3 heures du matin sa clinique sans doute à cours de pédiatre m'a appelé pour un nouveau né en difficulté à qui j'ai rendu service sans l'hospitaliser. Les parents étaient ravis.

    Curieusement j'ai été rappelé de plus en plus souvent par tous les gynécologues de la clinique. Je suis rapidement devenu le principal pédiatre. "Le quartier était devenu porteur" !

     Mon activité de pédiatre a été guidée par quelques principes simples :

- Ne pas nuire.
- Expliquer calmement et simplement les situations même les plus difficiles aux parents.
- Eviter les examens complémentaires et le recours à l'hospitalisation.
- Donner le moins possible de médicaments. En pédiatrie, des explications sans médicament ou du Paracétamol suffisent 9 fois sur 10.
- Ne pas faire attendre les gens inutilement.
-Prendre tout son temps quand la situation l'exige.

Bien sûr, on ne peut pas plaire à tout le monde. Ceux qui voulaient beaucoup de médicaments ont dû aller voir ailleurs.

J'ai rendu quelques services, j'en ai même sauvé quelques uns et je ne crois pas avoir fait de grandes erreurs, en tous cas je n'en ai pas eu connaissance.

    Quelques anecdotes pour terminer:

    Jean a 2 ans il est tranquillement dans les bras de son papa dans le salle d'attente, la dame dont je dois voir l'enfant me dit de voir "Jean" avant car elle le trouve fatigué.
Elle a raison : Jean est couvert de bleus, des hématomes. Il a un Purpura fulminans lié à une septicémie à méningocoque ( je le saurai plus tard). Je lui fais immédiatement une injection d'amoxicilline et l'envoie aussitôt à l'hôpital. Il guérira sans séquelles.

    Marie vient de naitre au milieu de la nuit elle respire mal. J'arrive 10 mn plus tard. L'anesthésiste la ventile au masque mais elle est bien bleue. Je l'intube et m'aperçois  que l'oxygène n'est pas ouvert . J'ouvre l'oxygène. Jeanne devient rose bien réactive. Elle passe son bac cette année très bonne élève et en bonne santé. J'ai gardé pour moi l'histoire de l'oxygène !

    Luc a 18 ans, bon élève en terminale S. Il vient consulter, avec son frère et sa mère pour une vérification des vaccins.  Je parle de ma retraite . La mère me raconte qu'à la naissance de Luc, elle ne m'avait guère apprécié (on ne peut pas plaire à tout le monde). Luc est né en climat fébrile il a une bonne réactivité mais j'ai un doute. Je le mets sous antibiotiques injectables. La mère, un peu tendance homéopathie, s'étonne et me demande pourquoi. J'aurais répondu "sans antibiotique il mourra". J'ai dû être plus diplomate mais c'est son souvenir. Les prélèvements faits sont tous revenus positifs au Streptocoque B souvent responsable de septicémies ou de méningites néonatales.
La mère vient encore  me voir 18 ans plus tard. Elle a gardé son homéopathe avec ses granules quand tout va bien et le Dr Gamin avec son doliprane quand tout va mal.
Luc est accompagné de sa "copine" qui vient de commencer médecine. Je lui donne aussitôt  une belle édition reliée du Harrison  "Principes de médecine interne" ainsi qu'un N° récent  du "New Englang Journal of Medecine" , deux publications qui ont été comme ma "Bible" en médecine depuis toujours.
En faisant cela, j'ai l'impression de transmettre le flambeau. Les symboles et l'humanité sont importants.

Un regret :

Je n'ai pas de remplaçant. La pédiatrie est en train de disparaitre. Il reste 5 ou 6 pédiatres dans notre ville contre 10 ou 12 il y a 5 ans. Ceux qui restent sont débordés. Les médecins généralistes vont devoir se remettre à la pédiatrie. Il feront cela très bien. Les enfants qui ont des maladies chroniques ou sévères seront suivis à l'hôpital comme c’était déjà un peu le cas.

Un page se tourne :

J'ai une femme adorable, des enfants et petits-enfants. Je fais de la gravure à l'eau-forte , de la musique, le blog et bien d'autres choses. Je ne m'ennuierai pas !

"Merci à tous ceux qui m'ont fait confiance. Ma vie de pédiatre a été merveilleuse grâce à vous ! Au revoir à tous !"

                                       mis à jour le 12/02/2015
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2 commentaires:

  1. C'est bien dommage que vous vendredi je vous ai vu avec ma fille (la plus belle du pays) avec beaucoup de stresse mais en sortant de votre cabinet jetais pleine d'assurance d'avoir une fille en parfaite santé et jai surtout repri confiance en mon role de mere.bonne retraite a vous

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  2. Bonjour O.iboukoun et à tous ceux qui m'ont témoigné leur sympathie.
    Le rôle du pédiatre est bien sûr de soigner les enfants mais surtout de rassurer les parents et de leur donner confiance.
    Les parents sont souvent très compétents. Je n'ai connu en 30 ans qu'une seule mère véritablement incompétente. Elle avait été abandonnée par sa mère. D'autres ont été poétiques mais , on ne peut pas toujours être dans le moule. D'ailleurs il y a des tas de moules et donc de façons de s'occuper de ses enfants.
    Ce n'est pas tous jours facile d'être parents et personne ne connait "La Solution"

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