jeudi 6 novembre 2014

Le Dr Gamin prend sa retraite mais le blog continue

Dessin de Geluck
J'ai largement dépassé la date de péremption donc j'arrête au 31 décembre 2014.
 Certains me disent : "mais je vous aurais donné 5 ans, 10 ans de moins".
"Pourquoi pas 20 tant qu'on y est ?"

Après une longue carrière dans les Hôpitaux de Paris où j'ai vu "des cas",
je me suis installé en province où j'ai vu "des enfants et leurs parents".

Là où je me suis installé il y avait de bons pédiatres, j'étais "parisien", on n'avait pas besoin de moi. Les débuts ont été difficiles. Après quelques mois, je suis allé voir le plus grand obstétricien de la ville installé à  50 mètres de chez moi. Il m'a expliqué, lui qui faisait naitre tant d'enfants que mon quartier (et le sien donc !) n'était pas porteur, il n'y avait pas d'enfants.

    Quelques années plus tard vers 3 heures du matin sa clinique sans doute à cours de pédiatre m'a appelé pour un nouveau né en difficulté à qui j'ai rendu service sans l'hospitaliser. Les parents étaient ravis.

    Curieusement j'ai été rappelé de plus en plus souvent par tous les gynécologues de la clinique. Je suis rapidement devenu le principal pédiatre. "Le quartier était devenu porteur" !

     Mon activité de pédiatre a été guidée par quelques principes simples :

- Ne pas nuire.
- Expliquer calmement et simplement les situations même les plus difficiles aux parents.
- Eviter les examens complémentaires et le recours à l'hospitalisation.
- Donner le moins possible de médicaments. En pédiatrie, des explications sans médicament ou du Paracétamol suffisent 9 fois sur 10.
- Ne pas faire attendre les gens inutilement.
-Prendre tout son temps quand la situation l'exige.

Bien sûr, on ne peut pas plaire à tout le monde. Ceux qui voulaient beaucoup de médicaments ont dû aller voir ailleurs.

J'ai rendu quelques services, j'en ai même sauvé quelques uns et je ne crois pas avoir fait de grandes erreurs, en tous cas je n'en ai pas eu connaissance.

    Quelques anecdotes pour terminer:

    Jean a 2 ans il est tranquillement dans les bras de son papa dans le salle d'attente, la dame dont je dois voir l'enfant me dit de voir "Jean" avant car elle le trouve fatigué.
Elle a raison : Jean est couvert de bleus, des hématomes. Il a un Purpura fulminans lié à une septicémie à méningocoque ( je le saurai plus tard). Je lui fais immédiatement une injection d'amoxicilline et l'envoie aussitôt à l'hôpital. Il guérira sans séquelles.

    Marie vient de naitre au milieu de la nuit elle respire mal. J'arrive 10 mn plus tard. L'anesthésiste la ventile au masque mais elle est bien bleue. Je l'intube et m'aperçois  que l'oxygène n'est pas ouvert . J'ouvre l'oxygène. Jeanne devient rose bien réactive. Elle passe son bac cette année très bonne élève et en bonne santé. J'ai gardé pour moi l'histoire de l'oxygène !

    Luc a 18 ans, bon élève en terminale S. Il vient consulter, avec son frère et sa mère pour une vérification des vaccins.  Je parle de ma retraite . La mère me raconte qu'à la naissance de Luc, elle ne m'avait guère apprécié (on ne peut pas plaire à tout le monde). Luc est né en climat fébrile il a une bonne réactivité mais j'ai un doute. Je le mets sous antibiotiques injectables. La mère, un peu tendance homéopathie, s'étonne et me demande pourquoi. J'aurais répondu "sans antibiotique il mourra". J'ai dû être plus diplomate mais c'est son souvenir. Les prélèvements faits sont tous revenus positifs au Streptocoque B souvent responsable de septicémies ou de méningites néonatales.
La mère vient encore  me voir 18 ans plus tard. Elle a gardé son homéopathe avec ses granules quand tout va bien et le Dr Gamin avec son doliprane quand tout va mal.
Luc est accompagné de sa "copine" qui vient de commencer médecine. Je lui donne aussitôt  une belle édition reliée du Harrison  "Principes de médecine interne" ainsi qu'un N° récent  du "New Englang Journal of Medecine" , deux publications qui ont été comme ma "Bible" en médecine depuis toujours.
En faisant cela, j'ai l'impression de transmettre le flambeau. Les symboles et l'humanité sont importants.

Un regret :

Je n'ai pas de remplaçant. La pédiatrie est en train de disparaitre. Il reste 5 ou 6 pédiatres dans notre ville contre 10 ou 12 il y a 5 ans. Ceux qui restent sont débordés. Les médecins généralistes vont devoir se remettre à la pédiatrie. Il feront cela très bien. Les enfants qui ont des maladies chroniques ou sévères seront suivis à l'hôpital comme c’était déjà un peu le cas.

Un page se tourne :

J'ai une femme adorable, des enfants et petits-enfants. Je fais de la gravure à l'eau-forte , de la musique, le blog et bien d'autres choses. Je ne m'ennuierai pas !

"Merci à tous ceux qui m'ont fait confiance. Ma vie de pédiatre a été merveilleuse grâce à vous ! Au revoir à tous !"

                                       mis à jour le 12/02/2015
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jeudi 24 avril 2014

Le syndrome pied main bouche ou Hand, Foot and Mouth Disease !



Le syndrome pied main bouche a été décrit au milieu des années 1950. Il est dû à un virus du groupe des Enterovirus qui contrairement à ce que l'on peut penser ne sont pas forcément liés aux intestins.

Signes de la maladie :

Après une incubation de 3 à 6 jours peuvent survenir une fièvre modérée, une anorexie, un mal de gorge et des douleurs abdominales.
L'éruption lorsqu'elle est caractéristique concerne essentiellement les mains, les pieds et de temps en temps le pourtour de la bouche et les fesses. Il s'agit de taches rouges plates (des macules) souvent accompagnées de vésicules irrégulières.
Main: près du pouce, on distingue une vésicule ovale évocatrice Photo: NEJM
Image WebMed
  A la différence de la varicelle, les vésicules sont ovales, durables et d'age similaire.

Photos:NEJM
Si on ouvre la bouche on découvre des petits aphtes sur la langue ou sur le voile du palais dans la moitié des cas.
Les formes atypiques sont fréquentes. 
La maladie peut être confondue avec la gale. En effet il existe parfois des lésions de grattage et un prurit. J'ai moi-même observé un cas très évocateur. Cependant le prélèvement fait à l'occasion d'une étude sur l'origine de ces maladies nous a montré qu'il s'agissait d'un virus Coxsackie.

Épidémiologie :
93 enfant sur 113 cas que j'ai vus, ont moins de 3 ans
 La maladie survient essentiellement chez les enfants de moins de cinq ans en crèche ou en collectivité.

On peut en voir toute l'année.

Évolution, complications :

La maladie est bénigne. Elle guérit en une semaine environ.
Lorsque l'atteinte des doigts est importante, on
Atteinte d'un ongle 1 mois plus tard Photo Dr Gamin
peut voir un mois plus tard des lésions des ongles qui se dédoublent et parfois tombent, mais repoussent parfaitement. La photographie montre l'ongle d'un enfant de deux ans qui a eu un syndrome pied main bouche un mois plus tôt.

Les complications sont exceptionnelles : on a décrit des atteintes cardiaques avec des myocardites, des pneumonies et en Asie des encéphalites.

À Taïwan en 1998, une épidémie a concerné plus de 120 000 personnes. Il y a eu malheureusement 78 morts chez les enfants de moins de cinq ans par œdème ou  hémorragie pulmonaire.

En Chine de mai 2008 à juillet 2010  une épidémie importante s'est développée entraînant la mort de 14 enfants essentiellement par défaillance cardio-respiratoire, associée à une encéphalite. Quelques enfants ayant eu des symptômes de type encéphalite rappelant la poliomyélite, ont eu par la suite des faiblesses musculaires, des troubles du développement. Ces complications étaient pratiquement presque toutes liées à l'Enterovirus 71 .
Heureusement en Europe nous ne rencontrons pas ce type de complications. L'épidémie de ces dernières années est restée limitée sans conséquences graves.

Les responsables : les Enterovirus
Agents responsables 570 cas. Laboratoire de Virologie de Clermont-Ferrand
Cette catégorie comporte :
- les Rhinovirus qui donnent des rhumes et des bronchites,
- les Coxsackies A6 et A16 surtout ou l'Enterovirus 71qui sont souvent responsables de ce syndrome,
- le virus de la poliomyélite qui donne des paralysies graves fait aussi partie des Enterovirus, et bien d'autres virus.

Traitement :
 Comme pour la plupart des maladies virales, le traitement est purement symptomatique. La maladie guérit aussi vite, avec ou sans traitement ! On soigne la fièvre, la douleur lorsqu'elle existe mais cette maladie est peu douloureuse.

C'est donc une maladie curieuse associée à plusieurs types de virus, dont l'évolution est tout à fait favorable chez nous.

" J'ai entendu dire que dans une école il y avait quatre cas de gale!! Je me demande s'il s'agirait pas plutôt d'une erreur de diagnostic et donc de syndromes pied main bouche atypiques. La gale, "ça" gratte énormément, le syndrome pied main bouche gratte nettement moins . C'est quand même plus sympa comme diagnostic !
 À bon entendeur salut"


Références: 
 Nadir Goksugur, M.D., and Sevil Goksugur, M.D. Hand, Foot, and Mouth DiseaseN Engl J Med 2010; 362:e49April 8, 2010

 Monto Ho, M.D., Eng-Rin Chen, Dr.Med.Sci., Kwo-Hsiung Hsu, M.S. et coll. An Epidemic of Enterovirus 71 Infection in Taiwan N Engl J Med 1999; 341:929-935September 23, 1999

 Min Jiang, M.D.Dan Wei, M.D.et col :Autopsy Findings in Children with Hand, Foot, and Mouth Disease
 N Engl J Med 2012; 367:91-92July 5, 2012

Audrey Mirand et col: Syndrome pied main bouche: Surveillance prospective sur 3 ans en pédiatrie de ville et aux urgences pédiatriques à Clermont-Ferrand.

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mardi 11 mars 2014

Mégalérythème épidémique (5ème maladie) et Parvovirus B19

Le virus :

Le Parvovirus B19 est un petit virus de 20 à 25 mm de diamètre comportant un ADN à simple brin.  Le virus cible les cellules progénitrices érythroídes à croissance rapide, qu'on retrouve dans la moëlle osseuse, le foie fœtal, le cordon ombilical et le sang périphérique chez l'humain. On trouve aussi le virus dans les plaquettes et les tissus cardiaques, hépatiques, pulmonaires, rénaux, endothéliaux et synoviaux.

Parvovirus B19 (flèches) Image NEJM

Les jours rouges sont évocatrices. Cliché Dr Gamin avec l'autorisation de la maman
 Physiopathologie :

 L'éruption, les arthropathies correspondent  à l'apparition d'anticorps antiviraux. Il est probable que ces symptômes soient dus à la formation et le dépôt de complexes immuns dans la peau et ailleurs. Les tests sérologiques à ce stade de l'infection montre généralement la séroconversion, les anticorps IgM , ou la présence d'anticorps IgG anti- Parvovirus .

L'infection par le Parvovirus B19, exclusivement humaine, est mondiale.
  La moitié des jeunes adolescents ont des anticorps spécifiques anti-Parvovirus B19. Les personnes âgées  sont séropositives  pour la plupart. Dans les climats tempérés, les infections se produisent par petites épidémies. Le virus se propage par les gouttelettes respiratoires. Le Parvovirus B19 a également été transmis par des produits sanguins.

Image Wikipedia
L'éruption est souvent discrète. Il faut la chercher. Cliché Dr Gamin
La maladie (la 5ème dans le classement ancien) : Mégalérythème épidémique :

Image NEJM
La plupart des cas d'infection par le Parvovirus B19 sont asymptomatiques.
La fièvre et des symptômes pseudo-grippaux non spécifiques surviennent au début, pendant la phase de virémie (premier pic bleu en bas de l'image) .
Après 10 à 15 jours, l'éruption cutanée (second pic bleu en bas de l'image)  apparaît sous forme d'érythème sur les joues (éruption en « joues giflées »). Puis sous forme d'éruptions maculo-papuleuses sur les extrémités et le tronc. Les éruptions peuvent avoir un centre clair, donnant un aspect réticulaire, en dentelle. Le deuxième stade dure environ 1 à 6 semaines. Le patient à ce stade n'est plus contagieux.

Chez les adultes :
 En particulier chez les femmes d'âge moyen, l'infection peut entrainer une arthropathie liée aux complexes immuns. Non seulement une arthralgie, mais aussi une arthrite inflammatoire chez la moitié des patients plus âgés, généralement des mains et parfois des chevilles, des genoux et des poignets, pouvant imiter une polyarthrite rhumatoïde, avec un test pour le facteur rhumatoïde parfois positif. Cependant, l’arthropathie associée au Parvovirus B19 disparaît généralement en quelques semaines, et même si les symptômes persistent pendant des mois ou des années, la destruction des articulations ne se produit pas.

Infection par le Parvovirus B19 chez une femme enceinte :

Les études immunologiques indiquent que près de la moitié des femmes enceintes sont déjà immunisées contre le Parvovirus et ne craignent rien. On recommande aux femmes enceintes ayant des enfants malades à la maison de se laver fréquemment les mains et d'éviter de partager des ustensiles. Cependant,  l'enfant est surtout contagieux au début avant l'apparition de l'éruption quand le diagnostic n'est pas encore fait.
La transmission transplacentaire du virus, peut provoquer une fausse couche. Le virus infecte le foie fœtal, lieu de production des globules rouges au cours du développement précoce. L'aspect gonflé lors d’une anasarque avec des œdèmes, une ascite,  est le résultat d’une anémie sévère et peut-être aussi une myocardite, qui contribuent toutes deux à une insuffisance cardiaque. Une chute des plaquettes peut accompagner l’anémie. L’infection au cours du deuxième trimestre présente un plus grand risque d’anasarque. La plupart des infections à Parvovirus B19 pendant la grossesse ne conduisent pas à une perte du fœtus. Les transfusions in utero peuvent améliorer la situation. Les quelques cas d'anomalies de développement des yeux ou du système nerveux  signalés sont peut-être des coïncidences.

Infection persistante à Parvovirus :

Un manque d'anticorps protecteurs permet au Parvovirus B19 de persister. En l'absence d’immunité antivirale, les manifestations habituelles de la cinquième maladie ne se développent pas (parce que les complexes antigène-anticorps ne se forment pas). Une anémie grave peu se développer, nécessitant une transfusion. Les anticorps anti-Parvovirus sont généralement absents, mais le virus peut être détecté facilement dans la circulation, souvent à des niveaux très élevés .
Ces situations sont rares et liées à un déficit immunitaire congénital ou acquis.

Autres manifestations  particulières :

Une crise aplasique transitoire associée à l'infection à Parvovirus B19 peut survenir chez les personnes ayant des taux réduits d'érythrocytes, par exemple en cas d'anémie liée à une carence en fer, de drépanocytose, de VIH, de micro-sphérocytose ou de thalassémie.

Mode de transmission :

La transmission se fait surtout par contact personnel, par des aérosols, des sécrétions respiratoires ou des gouttelettes de salive. L'enfant est surtout contagieux au début avant l'apparition de l'éruption et donc avant le diagnostic. Le virus peut aussi être transmis verticalement de la mère au fœtus ou lors de transfusions de sang ou de produits sanguins contaminés (surtout des concentrés cumulés des facteurs VIII et IX), et lors de transplantations d'organes (infections nosocomiales iatrogènes) Le risque de transmission verticale au fœtus est d'environ 33 %. .

Période d'incubation : de 4 à 14 jours, mais elle peut durer jusqu'à 21 jours :

Transmissibilité : la maladie se transmet surtout avant l'apparition des éruptions cutanées chez les personnes dont c'est la seule manifestation, et ne peut probablement pas être transmise au stade de l'éruption en raison de la disparition de la virémie. Les patients sont très contagieux pendant les crises aplasiques et devraient être placés en quarantaine pour prévenir la transmission du virus. Les personnes présentant une crise aplasique peuvent transmettre la maladie jusqu'à 1 semaine après l'apparition des symptômes. Les personnes immunodéprimées atteintes d'une infection chronique et d'une anémie grave peuvent demeurer contagieuses pendant des mois, voire des années.

Premiers soins et traitement : 

Habituellement, aucun traitement particulier n'est requis en cas d'infection à Parvovirus B19 chez des patients immunocompétents . Le traitement des symptômes comme la fièvre, la douleur et les démangeaisons peut être nécessaire. Les adultes présentant des douleurs et des gonflements des articulations peuvent avoir besoin de repos et d'anti-inflammatoires, comme des anti-inflammatoires non stéroídiens (AINS) pour soulager leurs symptômes .

"Un article assez grand pour une maladie assez petite en nombre de cas mais assez grande par le type de ses manifestations dont les plus sévères sont heureusement fort rares. "


Références :

 Parvovirus Faculté de médecine Pierre et Marie Curie
Parvovirus B19 wikipedia

                                                                  
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                                       mis à jour le 14/04/2014
                                     

dimanche 2 février 2014

Le diabète insulino dépendant (2) : L'acidocétose chez l’enfant diabétique


L’acidocétose, appelée communément coma acido-cétosique est soit une situation inaugurale du diabète, soit un accident au cours de l’évolution de la maladie. C’est une situation grave nécessitant un traitement urgent.
Pour les médecins qui n'ont pas de service de soins intensifs, "un traitement à l'ancienne"  très efficace sauve le malade.

Causes de l’acidocétose :

La cause unique est la carence en insuline, parfois accompagnée d’une infection qui augmente les besoins en insuline. La carence en insuline se voit au début du diabète  où elle devient manifeste en peu de jours. Elle se voit aussi chez certains grands enfants ou surtout adolescents qui "oublient"  leurs piqures d' insuline et plus rarement en cas de problème avec la pompe ou son aiguille.

Mécanisme de l’acidocétose diabétique :

Le foie produit le glucose et les corps cétoniques
L’acidocétose n’est que l’exacerbation d’un phénomène naturel d’adaptation à la carence énergétique : la cétose sans acidose que l'on peut rencontrer lors d’une gastro-entérite sévère, ou d’un jeûne prolongé.
Chez le diabétique, la carence énergétique est liée au manque d’insuline et donc à la difficulté pour le glucose de pénétrer dans les cellules. Pour compenser cette baisse du glucose intracellulaire, l’organisme augmente la glycémie et mobilise les énergies de substitution : les graisses.

 L’augmentation de la glycémie :
Le foie libère le glucose stocké sous forme de glycogène (glycolyse dépendant du glucagon et de l’adrénaline) et fabrique du glucose « de novo» à partir des trioses (acide lactique et pyruvique) ou de l’alanine, provenant des muscles (cortisol).
La glycémie atteint facilement 40 mM (8 g/l) et même 60 mM (12 g/l) chez le nourrisson.Ce glucose diffuse dans les cellules cérébrales même en l'absence d'insuline. Il contribue à augmenter l'osmolarité potentielle de ces cellules. Cette notion sera capitale pour le traitement.
Dès que la glycémie dépasse 1, 8 g/l, le glucose passe dans les urines en entrainant de l’eau. Cette « polyurie » entraine une soif qui permet de compenser les pertes.


Synthèse des corps cétoniques à partir de l'acétyl CoA
Les graisses et Les corps cétoniques : 
Elles constituent un excellent carburant en particulier pour les muscles. Elles proviennent du tissu adipeux. Elles sont dégradées sous forme d’acétyl Co A ce qui fournit une très grande quantité d’énergie récupérée sous forme d’ATP.
Cependant la dégradation excessive des acides gras s’accompagne de la production de corps cétoniques (acéto-acétate et acide alpha céto-glutarique). Ces corps cétoniques sont des acides toxiques pour notre organisme. Il entraine une acidose métabolique. Leur production dépend grandement du taux de glucagon, très élevé dans ces situations.
L’augmentation du taux de glucagon est donc utile au début, mais le glucagon plus les corps cétoniques provoquent des nausées puis des vomissements qui empêchent le sujet de s’hydrater.  La polyurie, les vomissements entrainent rapidement une déshydratation vite sévère .
Les électrolytes :
 Ce sont des éléments moléculaires d'une extrême importance dont le taux est constant. On peut parmi les plus impliqués lors du traitement citer le sodium (Na), le potassium (K), le bicarbonate (HCO3). C'est un chapitre très spécialisé que nous ne développerons pas ici.
Ces éléments interviennent dans l'activité de nos cellules. Leur perturbation, liée à la fuite urinaire et aux vomissements, ainsi qu'à l'équilibre acido-basique peut avoir des conséquences gravissimes qu'il convient de prévenir.

On peut bien sûr estimer  les désordres par une prise de sang, mais ce qui est capital c'est la situation intracellulaire.
Faire une analyse du sang, c'est comme "regarder dans la rue (le sang) pour savoir ce qu'il y a dans les maisons (les cellules) ! "


Signes de l'acido-cétose :

La polyurie (les urines sont claires), la soif, la perte de poids, les douleurs abdominales pouvant simuler une urgence chirurgicale telle que l'appendicite, les nausées puis les vomissements sont signes d'une carence en insuline importante. L'accélération du rythme cardiaque et la cyanose périphérique signe la présence d'adrénaline.
L'augmentation de la fréquence respiratoire associée à un respiration ample signe l'acidose. L'air expiré contient de l'acétone qui a une odeur fruitée de pomme très caractéristique.
En l'absence de traitement une déshydratation sévère avec une immense fatigue proche du coma s'installe, aboutissant à la mort.

Ce qui peut être confondu avec une acidocétose :
La seule situation que j'ai rencontrée est celle d'un enfant qui avait une gastro-entérite sévère avec des vomissements, une déshydratation , une glycosurie importante, une grande cétose, une glycémie à 18 mM (3.5 g/l). Un élément était insolite : les urines rares et foncées. La biologie montrait l'absence d'acidose. Cet enfant était en cétose de jeûne. Il avait bu une boisson très sucrée souvent recommandée quand on vomit. Il a guéri sans insuline et n'est pas devenu diabétique.

Examens biologiques au cours d'une acidocétose :

On dose couramment le glucose les électrolytes, le pH, les éléments figurés du sang globules rouges, et globules blancs.
Si on ne dispose pas d'un laboratoire, on peut estimer le glucose et les corps cétoniques avec des bandelettes sanguines et urinaires. Le dosage des électrolytes n'est pas  indispensable. Le pH (l'acidose) peut être estimé par la fréquence et l'amplitude de la respiration. Quant aux globules rouges, il sont souvent élevés en raison de la déshydratation et les globules blancs également en raison de la démarginalisation. 

Traitement de l'acidocétose diabétique :

Remarque préliminaires : 

Les écueils  qui guettent le diabétique en acidocétose sont :
Le chirurgien "au scalpel un peu rapide", dans les formes inaugurant un diabète et simulant une appendicite. On voyait cela tous les ans dans notre douce capitale.
Le médecin  "qui s'y connait pour vous corriger tout cela rapidement".  Il est en effet assez facile de faire baisser la glycémie rapidement. Cependant comme les cellules cérébrales sont bourrées de glucose, il se produit, par osmose un transfert d'eau vers le cerveau, un œdème cérébral qui comprime le tronc cérébral, qui entraine rapidement la mort. Il faut du temps pour corriger un situation métabolique aussi grave sans tuer le malade.
La "sonde urinaire" tellement pratique mais tellement dangereuse en raison du fort risque d'infection de ces urines sucrées. Nous la bannissons.

Si l'on dispose d'un service de soins intensifs, tout va bien. Je ne me permettrai pas de donner des conseils à mes collègues bien plus compétents que moi.

Si on ne dispose pas de service de réanimation, on peut faire :

"Un traitement à l'ancienne", comme nous l'avons pratiqué avec le Pr Lestradet durant plus de 40 ans avec une mortalité nulle.

Il faut apporter de l'insuline, réhydrater et nourrir:

Insulinothérapie :

Pas d'insuline intraveineuse directe ni  intramusculaire.
L'insuline rapide est mise dans chaque flacon de soluté bicarbonaté, salé, glucosé, à la dose de 22 unités par litre. La tubulure de perfusion est saturée en insuline en purgeant les 150 premiers ml de soluté perfusé.

 
Traitement "à l'ancienne" : évolution du pH  de la glycémie, la glycosurie et de la cétonurie


Réhydratation : 

Les débits sont exprimés en litre/mètre carré de surface corporelle(SC).
Elle se calcule avec les abaques de Dubois ou par la formule SC= (4P+7)/(P+90) où P est le poids.
En cas d'acidose sévère, pH inférieur à 7,10 ou une très grande hyperventilation il est raisonnable d'améliorer grandement le confort du malade par une perfusion de :
Bicarbonate à 14/00 (0,3 l/m²) en 10 minutes. C'est une quantité modeste à ne pas dépasser.
Puis ou en cas d'acidocétose moins sévère :
Soluté salé isotonique à 9/00 : 0,6 l/m² en 40 minutes puis de nouveau 0,6 l/m² en 60 minutes.
Puis, on apporte la solution suivante contenant par litre :
Glucose 100 g ;   NaCl   2 g (35 meq);  KCl 1,5 g (20 meq) au débit de 3 l/m²/24 H

Ces solutions que l'on peut utiliser dans d'autres circonstances où l'on doit hydrater le malade (diarrhée aiguë, chirurgie)  se trouvent souvent toutes préparées dans les hôpitaux français ce qui évite les erreurs de dosage.
Supplémentation potassique :
En l'absence d'anurie, le taux de potassium peut être doublé à 3 g/l (40 meq). Seules de très grandes hyperkaliémies, supérieures à 7 meq éventuellement associées à une insuffisance rénale peuvent retarder l'administration de potassium.

Nutrition intraveineuse :

Pour un enfant de 30 kg (SC= 1 m²) on apporte 4,5 litres de liquide, 100 unités d'insuline, 800 kcal.
Pour un adulte de 70 kg (SC= 1,7 m²) on apporte 7,5 litres 170 unités d'insuline, 1350 kcal.
Ce schéma très simple et très efficace doit être adapté en raison de situations particulières et rares (cardiopathie, insuffisance rénale, hyperkaliémie initiale).
Ce protocole de traitement permet un normalisation de la situation en 24 heures sans complication.

Comment éviter un acidocétose ? 

Pour l'enfant : c'est simple : dès les premiers signes d'un manque d'insuline (soif, urines claires) ou lors d'un contrôle de routine montrant un glycémie trop élevée sans raison connue, chercher des corps cétoniques urinaires, puis faire une injection ou un bolus d'insuline rapide du dixième de la dose quotidienne, renouvelable 3 heures plus tard en augmentant la dose si besoin et en prenant un flacon neuf d'insuline.

Pour les médecins: ne pas augmenter le nombre d'injections chez un adolescent qui en refuse deux, Passer plutôt à une. Il vaut mieux être mal "équilibré" avec une seule piqure faite de manière poétique que "très mal équilibré" avec plusieurs qu'on ne fait pas.



"En matière de traitement de l'acidocétose diabétique, l'urgence est de mise, mais la précipitation est mortelle. Pour les non spécialistes le traitement à l'ancienne de l'acidocétose c'est facile !"

Références:

Nicole Glaser (Sacramento USA) Pediatric Diabetic Ketoacidosis ... : Pediatr.Clin N Am 52 (2005) 1611-1635
H. Lestradet, Ph Dieterlen (Paris France) L'enfant et son diabète Ed. Privat 146-147
Dr Gamin: Expérience personnelle (Paris France)
La β-oxydation des acides gras et la cétogénèse: (Université d'Angers France)
Les besoins fondamentaux :l'eau, l'énergie, glucides, lipides, protides, oxygène, azote, fer:  Dr Gamin: 27/02/2010  sur ce site
          

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samedi 25 janvier 2014

Dépistage génétique prénatal par séquençage du génome foetal : progrès ou danger ?

Des chercheurs de l'université de Stanford, California, ont récemment realisé le séquençage d'un génome fœtal à partir d'ADN fœtal circulant  dans le sang de la mère, enceinte, préfigurant la possibilité d'effectuer le séquençage du génome entier dès le premier trimestre de la grossesse . Cette possibilité ajoute un nouveau niveau de complexité pour les décisions concernant le dépistage prénatal.
Les méthodes précédentes et encore actuelles de dépistage sont proposées et mises en place par des médecins. Elle fournissent des informations  sur le risque  de maladies ciblées en rapport avec la situation du patient et de sa famille.
Avec le séquençage, les futurs parents peuvent éventuellement obtenir de l'information génétique non seulement sur le risque de maladies de l’enfance, mais aussi de maladies de l'âge adulte. Certaines maladies sont  polygéniques, d'origine complexes voire liées à l’environnement telles que le diabète. Ailleurs, c'est plus simple, et lié à la présence de gènes provoquant des maladies autosomiques dominantes, ou des syndromes héréditaires du cancer du sein, de l’ovaire, et même des gènes favorisant la calvitie.
Ceci pourrait donc brouiller la frontière entre le diagnostic et le dépistage du risque de maladies futures.

Être porteur de risque ne signifie pas être malade.
Savoir que nous pouvons mourir d’un accident de la circulation n’est pas la même chose que savoir qu’il est écrit dans notre corps que ce risque existe. Nous pouvons le gérer car cela nous est familier.

Apprendre qu'il existe des gènes suspects dans nos chromosomes ne fait pas encore partie de notre "culture" et risque de nous déstabiliser sérieusement. La crainte sera peut-être inutile si rien ne se manifeste ou inefficace si  la médecine s'avérait impuissante lorsque la maladie survient.
Les parents peuvent ainsi en savoir plus sur le risque de maladies mais aussi sur des variations génétiques sans signification précise, qui pourraient ne jamais se manifester chez leur enfant à venir.

Une grande partie du génome ne s'exprime pas.
La raison n'est pas claire, mais dans ces parties silencieuses, il pourrait s'agir de gènes malfaisants inactivés.
Les dépister c'est comme détecter une voiture dangereuse : quelle importance si elle est à la casse !
Le séquençage mettra en évidence ces gènes mais ne dira pas s'ils sont à la casse.

Des questions se posent :
Qui pourra demander le séquençage du génome entier ?
Les parents auront-t-ils accès à toutes les informations génétiques de leur fœtus ?
Que faire de cette information ? Cette question se pose déjà pour les adultes.

Pour les fœtus la sanction risque d’être lourde :
Au pire, il sera éliminé.
Quel sera le fardeau pour les parents et leur enfant de connaitre ce risque ? Quelles seront les conséquences psychologiques du regard de l’entourage sur cet enfant qui a l’air parfait mais qui d’après le test ne l’est pas vraiment.

Pour les familles, la sanction risque également d’être sévère :
L’avortement est souvent une déchirure. Comment sera-t-il perçu si c’est seulement pour un risque ?
Même si l’enfant s’avère ultérieurement normal, et le reste, la grossesse sera perturbée.
La question de l’origine de la maladie se posera et risque de détruire les couples. Nous sommes certainement porteurs de gènes anormaux qui ne s’exprimeront jamais. Est-ce notre mère ou notre père qui les a transmis ?  On a parfois tendance à imaginer que puisque notre famille va bien, les soucis viennent de l’autre bord qui, peut-être nous cache quelque chose. Un doute dont on n’a nul besoin s’installe et c’est un ennui de plus.

Des informations inattendues peuvent être catastrophiques :
Si le père n’est pas le père. Cette situation est classique dans les familles où existe un risque génétique. La mère qui s’entend très bien avec le père trouve un autre géniteur et tout le monde est content.
Nous les pères, nous ne sommes jamais certains d’être les géniteurs, mais cela fait partie de la vie, depuis la nuit des temps !

Cette « avancée génétique » est de toute façon inéluctable car il y a un intérêt commercial substantiel.
On ne voit pas au nom de quels principes moraux, certains membres de la société pourraient demander d’interdire ces tests. Ce qui serait illusoire car ils seront accessibles sur internet.
On peut cependant souhaiter que les parents aient recours à ces tests après une information médicale sérieuse et que les résultats soient également discutés avec un médecin compétent. Ceci restera difficile en raison du manque de généticiens cliniciens disponibles.

On comprend ainsi que certaines nouveautés de la biologie moléculaire posent plus de questions qu'elle n'apportent de réponses.

"Le dépistage tous azimuts (par les méthodes de séquençage ou autres) est d’un bénéfice  contestable. Le dépistage ciblé pour des anomalies certaines est plus simple, plus efficace, plus facile à gérer. "

                         

Références:

lana R. Yurkiewicz, B.S., Bruce R et Col (Harvard Medical School) Prenatal Whole-Genome Sequencing — Is the Quest to Know a Fetus's Future Ethical?  N Engl J Med 2014; 370:195-197January 16, 2014
  H. Christina Fan,Wei Gu, Jianbin Wang et col (Stanford) : Non-invasive prenatal measurement of the fetal genome  Nature 487 ,320–324
Peter Braude, M.B., B.Ch., Ph.D ( King's College London) Preimplantation Diagnosis for Genetic Susceptibility:  N Engl J Med 2006; 355:541-543August 10, 2006


Je remercie particulièrement les auteurs du premier article (NEJM) auquel j'ai fait plus que des emprunts ! J'espère qu'ils ne m'en tiendront pas rigueur.

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samedi 4 janvier 2014

Le diabète insulino-dépendant (1 ) : La régulation de la glycémie

                               Meilleurs vœux pour l'année 2014

Le diabète insulino-dépendant ou diabète de type 1 survient chez l'enfant comme un coup de tonnerre dans un ciel serein.

Le premier jour l'enfant a soif et urine plus souvent, il se lève la nuit, Deux jours plus tard, il a des nausées ou vomit. Il continue à uriner abondamment, se déshydrate, et il est hospitalisé en urgence dans un état qu'on appelle coma acido-cétosique qui est plutôt un grand épuisement. Plus rarement, le diabète s'installe lentement avec un grand amaigrissement malgré un bon appétit. L'attention est attirée par l'abondance des urines. Le diagnostic est facile : les urines sont sucrées et le taux de sucre sanguin dépasse facilement 4 g /l (Normalement moins de 1 g/l).
Le traitement repose sur l'insuline après une éventuelle période de réhydratation. L'insuline ne se fait qu'en piqûres . Il faut avoir une alimentation équilibrée, faire du sport aussi longtemps que l'on le peut.

Le taux du sucre sanguin, c'est-à-dire la glycémie, varie en fonction des repas, de l'activité sportive, du stress.
Il faut donc adapter le traitement : la dose d'insuline.

Chez le sujet non diabétique, le taux de glucose reste autour de 1 gr/l  (5 mM) grâce à un contrôle étroit que l'on nomme " la régulation de la glycémie"

La régulation de la glycémie :

Pour simplifier, elle nécessite :

L'insuline: seule hormone hypoglycémiante.
Le glucagon, l'adrénaline, le cortisol, l'hormone de croissance : hormones hyperglycémiantes.
Le foie, les muscles, le tissu graisseux qui stockent les réserves énergétiques.
Le cerveau qui vient mettre son grain de sel au bon moment.

hypothalamus et hypophyse
hypothalamus et hypophyse impliqués dans la régulation de la glycémie













































 L'insuline:
pancréas, en haut, ilot de langerhans vu au microscope en bas






















Le mode d'action de l'insuline, seule hormone hypoglycémiante d'origine pancréatique, est en pratique assez discuté, même si en théorie, il est connu :

    Certains pensent que l'insuline permet l'utilisation du glucose de manière proportionnelle à la dose. Une unité d'insuline permet de consommer X grammes de glucose (X varie selon le malade). Il suffit donc de donner une quantité fixe de glucides (qui se transforment en glucose) et la bonne dose d'insuline et le tour est joué. Le diabète serait lié au défaut d'utilisation du glucose.

    D'autres ont bien compris que l'insuline facilite seulement la traversée du glucose au travers des membranes cellulaires par le biais des transporteurs spécifiques du glucose, ce qui n'a pas grand chose à voir avec le devenir du glucose intra cellulaire.

    En l'absence d'insuline le sucre traverse mal la membrane cellulaire. L'organisme est en état de carence énergétique. Le cerveau met son grain de sel. Il faut augmenter le taux de glucose pour que celui-ci parvienne quand même à traverser. Avec un taux de sucre à 5 ou 10 gr/l la traversée se fait. La cellule reçoit sa ration tout va mieux, mais pas pour longtemps.

Les mécanismes hyperglycémiants sont multiples :

La prise de produits sucrés permet en l'absence d'insuline de sauver le malade. Le sucre ne rend pas le malade diabétique, mais le sauve.

Diverses hormones augmentent le taux de sucre :
Le glucagon libère le sucre du foie mais entraine la production de corps cétoniques, toxiques à haute dose.
L'adrénaline et la cortisone ont des effets sur les muscles et le foie.
L'hormone de croissance (HGH) libère les acides gras qui pourront être brulés en remplacement du glucose.

 Cependant il y a des limites et la vie sans insuline est rapidement compromise.

Le manque d'insuline n'est pas la seule anomalie lors d'un diabète. L'élévation du taux de glucagon est très délétère.

Le glucagon : 


Localisation des cellules Alpha à glucagon en vert et Delta à somatostatine en rouge.

Le glucagon, d'origine pancréatique, libère le glucose stocké dans le foie, favorise l'utilisation de acides gras et la production des corps cétoniques (bons carburants pour le cœur et pour le cerveau après adaptation).

La situation de l'enfant diabétique est, à cet égard, critique :

 Le plus souvent, la sécrétion résiduelle du pancréas chez l'enfant diabétique est quasiment nulle ce qui fait que les mécanismes hyperglycémiants sont très stimulés permettant temporairement de sauver le malade. Le glucagon d'origine pancréatique dont la sécrétion est localement bloquée par la présence d'insuline chez un sujet normal, voit ici son taux décuplé de façon quasi permanente, rendant le diabète très instable. Les  enfants ont besoin de doses importantes d'insuline  (1,2 unité par kilo et par jour en moyenne) et gardent un diabète toujours difficile à équilibrer. Les adultes qui produisent un peu d'insuline dans leur pancréas ont eux un diabète stable 9 fois sur 10 avec des doses faibles d'insuline.

L'adrénaline est synthétisée par la glande médullo-surrénale et libérée en cas d'hypoglycémie par un mécanisme neurogène (le grain de sel du cerveau !). C'est l'hormone du stress. Elle accélère le cœur, contracte les artérioles, favorisant l'irrigation du cerveau, augmente la glycémie en libérant le sucre du foie.

Le cortisol est synthétisé par la cortico-surrénale sous l'influence de l'ACTH hypophysaire (le grain de sel du cerveau !). Il libère de l'alanine (acide aminé glyco-formateur) d'origine musculaire, reprise par le foie pour faire du glucose.

L'hormone de croissance favorise la libération des acides gras, carburant qui va épargner la consommation de glucose.

La somatostatine, citée dans la légende précédente bloque l'action des hormones protidiques. Les tentatives d'utilisation dans le diabète ont rapidement étés arrêtées en raison d'hypoglycémies graves.

Le foie :

Le foie joue un rôle important dans la régulation de la glycémie.
Le foie reçoit le sang venant de la veine porte. La veine porte draine les intestins et le pancréas. Le sang de la veine porte est donc riche en insuline et en glucose juste après les repas. Le foie va stocker le glucose sous forme de glycogène (sous l'action de l'insuline) et le relâcher en périodes de jeûne ou d'hypoglycémie (sous l'action du glucagon et de l'adrénaline).

Le foie permet également la dégradation des acides gras (action du glucagon) ce qui fournit de grandes quantités d'énergie pour notre organisme. Cette dégradation s'accompagne cependant de la production de corps cétoniques ( l'acétone !), bons carburants pour le cœur et parfois pour notre cerveau, mais toxiques à haute dose (acido-cétose)




Effet de l'insuline en bleu, du glucagon en rouge sur le foie et les muscles



Les muscles :

Les muscles sont sensibles à l'insuline. Il stockent le glucose sous forme de glycogène. Ce glucose ne peut cependant pas être relâché sous forme de glucose mais seulement sous forme de triose (c'est à dire un demi glucose : acide pyruvique ou acide lactique) qui peuvent réintégrer le métabolisme du glucose au niveau du foie (Cycle de Cori). Le cortisol, qui lyse les protéines, permet de libérer de l'alanine qui permet la synthèse hépatique de glucose.

Le tissu graisseux :

Il constitue une très importante réserve d'énergie sous forme de triglycérides (action de l'insuline). Ces réserves sont libérées sous forme d'acides gras libres (action de l'hormone de croissance). Les acides gras libres sont dégradés par le foie (action du glucagon).


La compréhension de la régulation de la glycémie est utile, mais non indispensable (heureusement !) pour se soigner quand on a un diabète insulino-dépendant.

Car on comprend très vite, intuitivement ce dont il s'agit.


"Un pauvre bougre abasourdi par la découverte d'un diabète chez son fils, m'a dit 8 jours plus tard : "Docteur ça collait dans les cabinets, alors j'ai augmenté l'insuline !" .

Il avait tout compris.


 Bibliographie :

L'insuline
Le Glucagon
Lehninger, Nelson, Cox : Principes de biochimie Ed. Flammarion
H. Lestradet , Ph. Dieterlen : L'enfant et son diabète.  Ed. Privas (épuisé) 
Les besoins fondamentaux :l'eau, l'énergie, glucides, lipides, protides, oxygène, azote, fer
Pediatric Clin. North Am Vol 52 N 6 Diabetes Mellitus In Children 339 pages sur ce sujet

Les dessins sont  tirés de : Lehninger, Nelson, Cox Principes de biochimie Ed. Flammarion

Ultérieurement nous verrons les aspects plus pratiques concernant le diabète insulino-dépendant.

Voir aussi: sur ce site:

Le diabète insulino dépendant (2) : L'acidocétose chez l’enfant diabétique

 

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